jeudi 26 mars 2009

L'HOMME OISEAU - Plus ça change, plus c'est pareil

Le comité d’enquête sur les oiseaux et mulots est prêt à crier son rapport. Tout le monde a vu sa chose, l’intérêt n’y est plus. La grande place est presque vide et c’est ce qu’il espérait. Le criard clame les conclusions.
- Nous confirmons que oui les mulots pondent.
- Et les oiseaux ?
- Les oiseaux, on ne sait pas, mais l’enquête se poursuit.
Comment ça, vous ne savez pas, reprend l’emmerdeur ?
- De fait, on n’a jamais réussi à voir un seul œuf, mais les nids regorgent d’oisillons. On ne peut donc pas affirmer que les oiseaux ne pondent plus.
Une voix interrompt le criard.
- Es-tu à nous dire qu’on vous a nourri tout ce temps pour une enquête bâclée !
Les esprits s’échauffent. Les clameurs attirent les passants. Plus la foule grossit, plus le scandale prend de l’ampleur.

Le fils Darwin, par pur hasard traverse la grande place. Il s’arrête, ouvre les yeux et commence à crier comme un cochon qu’on égorge.
- Regardez, regardez.
Personne ne porte attention au petit morveux. Il monte sur une bûche et ordonne.
- Silence. Si fort qu’il se surprend lui-même
Le silence se fait, mais juste le temps de repérer le jeune et lui tomber dessus. Le fils Darwin crie avec la force du condamné.
- Regardez l’animal; pointe une direction, et court à sa rencontre.

C’est un cheval, enfin peut-être ? La vue de la chose met un frein à la poursuite. Darwin rejoint la bête. Le cheval mais pas tout à fait, poursuit son petit bonhomme de chemin. Il croise la foule. Darwin le flatte, tourne autour comme une mouche à merde. L’air enjoué, le cheval se laisse approcher, toucher. Plusieurs suivent l’exemple de Darwin. Rien ne distrait la bête de sa route, petit pas à petit pas, de bouchée de foin à bouchée de foin, elle atteint et traverse le village. Pourquoi il ne court pas, questionnent les jeunes. Parcequ’il a les pattes trop petites, disent à la blague les grands. Et ils ont probablement raison. Ses petites pattes l’obligent à prendre son temps. À traverser la campagne à pas de tortue, pour à la fin du jour disparaître avec le soleil derrière la ligne d’horizon.

Dès l’aube le fils Darwin arpente les bois à la recherche de son cheval. Les mois puis les années s’écoulent, ses copains commencent à regarder les filles. Et toujours Darwin cherche son cheval.

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